Les travailleurs de la santé au Canada ont été confrontés ces dernières à des défis sans précédent, non seulement en raison des exigences de leur profession, mais aussi en raison de l'augmentation de la violence et des menaces sur leur lieu de travail. Alors qu'ils sont en première ligne risquant leur vie pour soigner les autres, la vague croissante d'agressions à leur encontre a suscité l'inquiétude dans tout le pays. Il est temps de reconnaître que les travailleurs de la santé sont attaqués et que nous devons prendre des mesures immédiates et soutenues pour assurer leur sécurité.

Le problème croissant de la violence dans les soins de santé

Les travailleurs de la santé au Canada, en particulier ceux qui travaillent dans les hôpitaux et les services d'urgence, sont confrontés à des niveaux de violence alarmants. Selon un rapport de la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et d'infirmiers (FCSI), près d'une infirmière sur cinq a subi des violences physiques sur son lieu de travail. Les infirmières et les autres professionnels de la santé sont souvent victimes de violences verbales, d'agressions physiques et de menaces, parfois quotidiennement. Une étude de l'Agence canadienne de la sécurité et de la santé au travail (CCOHS) a révélé que les travailleurs du secteur de la santé sont cinq fois plus susceptibles d'être agressés que les employés d'autres secteurs.

Cette tendance violente n'est pas récente. Elle se développe depuis des années, alimentée par des facteurs de stress croissants tels que les longues heures de travail, le manque de personnel et les défis posés par la pandémie de COVID-19. Mais la situation devient de plus en plus dangereuse. En 2021, un rapport de l'Association des infirmières et infirmiers de l'Ontario a révélé que près de 70 % des infirmières avaient été témoins ou victimes de violences physiques au travail. Il ne s'agit pas de simples chiffres, mais de personnes réelles dont la capacité à faire leur travail est gravement compromise par ces menaces.

L'impact sur le personnel de santé

Les conséquences de cette violence sont dévastatrices. Les travailleurs de la santé ne sont pas seulement confrontés à des blessures physiques, mais aussi à des traumatismes émotionnels et psychologiques. L'exposition continue à la violence peut conduire à l'épuisement professionnel, à l'anxiété, à la dépression et au syndrome de stress post-traumatique (SSPT). Dans certains cas, le personnel quitte complètement la profession, ce qui aggrave encore les pénuries de personnel déjà importantes dans le secteur de la santé au Canada.

Au-delà des personnes touchées, c'est l'ensemble du système de santé qui souffre. Lorsque les travailleurs de la santé sont blessés ou traumatisés, leur capacité à fournir des soins de qualité diminue. Cela crée un environnement dangereux pour les patients ainsi que pour les professionnels chargés de s'occuper d'eux. Le risque accru pour les travailleurs de la santé menace également la viabilité du système dans la mesure où de plus en plus de personnes se détournent de la profession pour des raisons de sécurité.

Que faire ?

Les taux alarmants de violence à l'encontre des travailleurs de la santé exigent une action immédiate et globale. Voici quelques mesures clés qui peuvent être prises pour assurer leur sécurité :

  1. Des renforcements de la législation et de la protection juridique :  Les sanctions pénales en cas de violence à l'encontre des travailleurs de la santé doivent être plus sévères. Dans certaines provinces canadiennes, il existe déjà des lois qui érigent en infraction pénale l'agression d'un travailleur de la santé. Toutefois, l'application de ces lois n'est pas uniforme. Nous avons besoin de lois plus claires et plus strictes assorties de sanctions plus sévères pour les contrevenants. Il convient d'établir une norme nationale pour la protection des travailleurs de la santé contre la violence, en fixant des seuils minimaux pour la formation, les effectifs et les sanctions.
  2. Des programmes de sécurité sur les lieux de travail  : Les hôpitaux et autres établissements de soins de santé doivent mettre en œuvre des protocoles de sécurité plus stricts. Ceci comprend des mesures de sécurité physique telles que des caméras, des boutons d'alarme et une présence policière accrue dans les zones à haut risque. Mais ceci doit aussi faire appel à des programmes de formation complets pour les travailleurs afin d'identifier et de désamorcer les situations violentes potentielles. Les institutions doivent donner la priorité aux programmes de santé et de sécurité qui promeuvent une culture du respect et de la vigilance.
  3. Soutien à la santé mentale : Les conséquences mentales et émotionnelles de la violence ne peuvent être ignorées. Les travailleurs de la santé doivent avoir accès à des ressources et à des programmes de soutien solides en matière de santé mentale. Qu'il s'agisse de services de conseil, de programmes de soutien par les pairs ou de journées consacrées à la santé mentale, nous devons veiller à ce que les personnes agressées ou traumatisées bénéficient du soutien dont elles ont besoin pour guérir et poursuivre leur travail. Sans ressources adéquates en matière de santé mentale, les travailleurs peuvent avoir l'impression que le système n'accorde pas d'importance à leur bien-être, ce qui ne fait qu'aggraver le problème.
  4. Sensibilisation et éducation du public :  Il est essentiel d'informer le public sur les difficultés auxquelles sont confrontés les travailleurs de la santé et sur l'importance de leur sécurité. De nombreux cas de violence sont dus à la frustration, au manque de compréhension, voire à la désinformation. Les campagnes de sensibilisation du public, soutenues par les médias et le gouvernement, peuvent contribuer à cultiver le respect et l'empathie à l'égard des travailleurs de la santé et à réduire les comportements agressifs au sein de la population.
  5. Disposer d’assez de personnel : L'une des causes profondes de la violence dans les soins de santé est le manque de personnel. Lorsque les travailleurs sont surchargés et à bout de souffle, les tensions augmentent et les incidents violents se multiplient. Les gouvernements et les établissements de santé doivent remédier aux pénuries de personnel en embauchant davantage de personnel et en réduisant la charge de travail afin de prévenir l'épuisement professionnel et la surcharge de travail.

Conclusion

Les travailleurs de la santé sont essentiels au fonctionnement du système de santé au Canada. Ils méritent de se sentir en sécurité et respectés sur leur lieu de travail. La tendance croissante à la violence à leur encontre est inacceptable. Il s’agit donc ici d’un appel à l'action pour chacun d'entre nous. Nous devons nous responsabiliser, non seulement en tant que citoyens, mais aussi en tant que société pour protéger ceux qui consacrent leur vie à prendre soin de nous. Il est temps que le gouvernement, les établissements de santé et le public s'unissent pour faire de la sécurité et du bien-être des travailleurs de la santé une priorité. Leur vie et notre système de santé en dépendent.

Sources:

  • Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et d'infirmiers (CFNU) - Violence in the Workplace Report
  • Agence canadienne de sécurité et de santé au travail - Workplace Violence Statistics
  • Association des infirmières et infirmiers de l'Ontario (OIIO) - Violence in Nursing Report